Rien ne sert de courir… Malgré le buzz qu’ils suscitent, les réseaux sociaux d’entreprise ne doivent pas être mis en place dans la précipitation. Décryptage et conseils d’Éric Mijonnet, Consultant Workplace Solutions & Enterprise Architecture chez T-Systems France.
Comment les DSI doivent-ils s’y prendre pour se lancer dans un projet de réseau social d’entreprise (RSE) ?
Éric Mijonnet : Avant toute chose, il ne faut pas se laisser emporter par les sirènes de l’IT. Les évolutions récentes des solutions RSE et de leurs concepts sous-jacents, montrent qu’il peut être risqué de figurer parmi les early adopters d’une plate-forme dont les usages sont encore en pleine maturation. Les technologies qui fonctionnent aujourd’hui ne sont pas celles d’il y a trois ans. Par exemple, Microsoft SharePoint, très prisé en 2013, est actuellement en profonde mutation sous l’influence de Yammer, des évolutions de OneDrive Entreprise ou de concepts apportés par Office Delve. Rappelons également que, selon le cabinet Gartner, seuls 10 % des projets RSE sont couronnés de succès, du fait d’un manque de recul dans la réflexion des entreprises !
Seuls 10 % des projets RSE sont couronnés de succès, du fait d’un manque de recul dans la réflexion des entreprises !
Or, dans le même temps, si l’on ignore les RSE, l’entreprise risque de se ringardiser. Ceci d’autant plus avec l’arrivée des Millenials habitués aux médias sociaux. Il est donc indispensable de se lancer dans un projet RSE mais il faut le faire avec prudence, en se hâtant lentement. Les DSI doivent donc comprendre, avant même de commencer le projet, si le collaboratif est ou non dans l’ADN de l’entreprise. Via une cartographie de ces usages, ils saisissent, en amont, le chemin à parcourir et l’appétence des différents profils utilisateurs aux nouveaux usages
Quelles sont les étapes à respecter ?
Chaque entité doit être embarquée au bon moment. Les ressources humaines seront inclues très tôt : elles sont bien sûr au cœur des démarches RSE grâce aux données qu’elles détiennent et qui peuvent enrichir simplement les profils des utilisateurs. Elles pourront même y trouver une valeur ajoutée grâce au partage des expertises et des connaissances encouragé par le réseau social. Par exemple, avec une population d’informaticiens, les RH pourront avoir une meilleure perception des différents savoir-faire en présence.
Vient ensuite le middle management qu’il ne faut pas engager trop tôt. Sans feuille de route ni objectif précis définis en amont, ils risquent de ne pas comprendre l’intérêt du RSE voire de le percevoir comme une perte de temps pour leurs équipes. En revanche, une fois qu’on les a « armés » pour faire comprendre l’intérêt du réseau social à leur équipes, ils deviennent des sponsors au moment du lancement, et des acteurs clés du succès
Quels sont ces objectifs à définir en amont ? Et en quoi sont-ils primordiaux ?
Ils peuvent être variés : encourager la transversalité entre les équipes ou partager les connaissances. En tous les cas, il faut une volonté stratégique claire poussée par un exécutif. Cela a, par exemple, été le cas chez Danone qui a réussi son projet RSE grâce à la volonté très forte du haut management d’encourager la collaboration en interne, au service de la croissance et de la performance de l’entreprise. Sans cet objectif bien défini qui répond à un besoin précis de l’entreprise, les utilisateurs ne comprennent simplement pas l’intérêt de leur participation.
Un projet RSE n’est pas tout à fait un projet informatique comme un autre.
Car, rappelons-le, un projet RSE n’est pas tout à fait un projet informatique comme un autre. La DSI doit convaincre les utilisateurs de l’adopter, contrairement à une messagerie qui est déployée sur l’ensemble de l’entreprise sans que les collaborateurs aient réellement le choix. C’est toute la difficulté de l’accompagnement au changement de ce type de projet.
Si vous deviez dessiner le portrait robot du réseau social d’entreprise 2016, quels sont les points que vous mettriez en avant ?
On assiste, selon moi, à une évolution « darwinienne » des plates-formes : les usages simples au yeux des utilisateurs gagnent au détriment des usines à gazavec leurs communautés trop complexes. Les outils qui fonctionnent aujourd’hui sont les Yammer ou les Slack qui se concentrent sur du conversationnel très simple, des partages de documents via des interfaces épurées. Côté grand public, cela se traduit par le succès de Facebook Messenger, et plus largement des applications mobiles au périmètre fonctionnel très concis.
Si vous ne voyez pas la vidéo, changez vos paramètres liés au cookies grâce au bouton suivantAu-delà du conversationnel, on constate également une véritable appétence des utilisateurs pour le collaboratif autour des documents. En témoigne l’importance grandissante de Google Drive, Dropbox, Box.com, etc. C’est la raison pour laquelle Microsoft investit tant dans son OneDrive Entreprise.
Pour résumer, le réseau social de 2016 se concentre sur deux fonctionnalités clés : le conversationnel et le document. Sans oublier bien sûr la notion de profil qui demeure la base des RSE, au même titre que les fonctions de capitalisation si chères aux entreprises, telle que la recherche.