Prix, interopérabilité, fonctionnalités, accompagnement RH… le marché du Cloud s’industrialise. Entretien avec Antoine Viale, directeur IT Sourcing Strategy chez ISG.
Pourquoi parler de guerre des Clouds ?
Antoine Viale : Avec la robotisation croissante et les technologies d’intelligence artificielle, le Cloud sous toutes ses formes (public, privé, hybride…) s’industrialise de façon massive. L’avantage pour les entreprises, c’est la réduction du nombre d’opérations nécessitant une intervention humaine. Les pionniers dans le domaine restent Amazon, Microsoft ou Google. Ces nouveaux venus s’imposent de plus en plus comme des acteurs crédibles face aux principaux acteurs traditionnels comme IBM, HP, CapGemini, ou Bull/Atos qui ont du mal à tenir le rythme tant en matière de fonctionnalités que de prix. De plus, les progrès réalisés ces dernières années vis-à-vis de l’interopérabilité sont considérables. Les entreprises peuvent donc très facilement basculer d’un Cloud à un autre. Conséquence : la guerre des prix fait rage entre les fournisseurs.
Quels en sont les risques et les opportunités pour les entreprises utilisatrices ?
Tout d’abord, l’accès aux ressources IT se voit grandement simplifié grâce aux progrès réalisés. Mais cette recomposition du paysage du Cloud cache un autre aspect plus complexe à gérer : il faudra prévoir l’évolution des équipes informatiques dont les tâches traditionnelles risquent de disparaître, notamment pour les couches basses de l’IT.
Dès lors, quelle stratégie d’accompagnement au changement mettre en place ?
Les DSI doivent faire évoluer leurs équipes en interne. L’objectif : développer de nouvelles compétences, tout particulièrement sur les sujets de gouvernance. En d’autres mots, il s’agit d’accompagner la DSI pour passer du « faire » au « faire faire ».
Cette recomposition du paysage du Cloud cache un autre aspect plus complexe à gérer : il faudra prévoir l’évolution des équipes informatiques.
Sans oublier que la transformation numérique et le multicanal constituent autant d’opportunités pour faire évoluer les compétences. C’est ainsi qu’Accenture a créé une division dédiée à la transformation de l’IT de ses clients avec près de 15 000 collaborateurs qui se consacrent désormais à l’optimisation des canaux de vente grâce à l’analytique. Une transformation qui n’est rendue possible que par le Cloud et son mode de facturation en fonction de la consommation réelle. C’est cette réduction des coûts qui autorise les investissements dans de nouveaux domaines liés à l’innovation.
À quels défis sont confrontés les DSI qui s’inscrivent dans ces projets de transformation ?
Le principal enjeu est lié à l’humain. Pour cela, il est primordial de tenir un discours de vérité. Il faut communiquer en amont sur les impacts concrets des programmes de transformation. L’objectif ? Identifier très tôt l’intérêt de chaque collaborateur pour les métiers d’avenir via des tests et des entretiens individuels. Cela passe par des descriptifs très détaillés des nouvelles fonctions et – bien évidemment – par un accompagnement RH (coaching, formations, entretiens, etc.).
Il faut communiquer en amont sur les impacts concrets des programmes de transformation.
Par exemple, dans le secteur industriel, nous avons été confrontés au projet de transformation d’une DSI de plus 300 personnes. Nous avons organisé des évaluations personnelles, des questionnaires en ligne ainsi qu’une analyse complète des nouveaux métiers et compétences en présence. Pour chaque collaborateur, nous avons ensuite proposé deux ou trois fonctions cibles. Par exemple, un responsable de service desk a été promu gestionnaire de contrats quand un responsable de production est devenu responsable du centre de compétences. De cette manière, tous les informaticiens ont évolué vers des fonctions liées à la gouvernance et l’ensemble du système d’information a été basculé dans le Cloud en douceur.
Antoine Viale possède plus de 25 ans d’expérience dans le secteur des services IT et télécoms. Il a préalablement travaillé pour Xerox, EDS (maintenant connu sous le nom de HPE), CSC et BT Global Services avant de rejoindre, il y a cinq ans, le bureau parisien du Cabinet ISG en tant que directeur. Avec son équipe, il conseille les directions de grands groupes du CAC 40 (incluant notamment Alcatel-Lucent, AXA, BNP Paribas, Carrefour, EDF…) sur la définition de leur stratégie pour leurs systèmes d’information et les accompagne dans la mise en œuvre de leur projet de transformation.